Nicolas Lebatard a imaginé le bâtiment d Nicolas Lebatard a imaginé le bâtiment du futur
Audacieux et créatif, ce projet veut répondre aux attentes des éleveurs et de la société, l'esthétique en prime.
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Toit vert. Outre son intégration dans l'environnement, la toiture végétalisée est une «solution d'avenir» qui favorise l'inertie thermique et limite les nuisances sonores.
1. Site unique. Le projet de Nicolas Lebatard repose sur un regroupement parcellaire, source de gain de temps et d'économies d'énergie.
2. Confort partagé. Fort de ses expériences en élevage, Nicolas Lebatard a étudié les conditions pour allier efficacité et bien-être des animaux.
L'oeil est vif et le débit de paroles porté par les convictions: à 26 ans, Nicolas Lebatard avance des idées claires sur les attentes des éleveurs en matière de conditions de travail tout en assumant sa part d'idéal. Doté d'un profil de créatif, il a trouvé un emploi à sa mesure dans le cabinet d'architecte Louis Paillard, à Paris. Mais il garde des racines toujours ancrées dans le bocage mayennais, celui de l'exploitation de ses parents installés en productions laitière et porcine sur 57 ha à Oisseau.
Le jeune fils d'éleveur a décroché son diplôme d'architecte en présentant un projet avant-gardiste mais réaliste de «ferme modèle». Le fait «d'oser» plancher sur ce thème était déjà un phénomène pour le moins remarquable au sein d'une corporation peu versée dans l'univers agricole. Et cela plus de cinquante ans après l'idée de «ferme radieuse» envisagée, mais non réalisée, par le célèbre architecte Le Corbusier.
Vision audacieuse
Pour Nicolas Lebatard, l'audace a payé. Il a conçu un bâtiment inédit qui a non seulement retenu l'attention de ses examinateurs mais séduit les éleveurs côtoyés dans la préparation du projet. Aujourd'hui, ceux-ci observent en plaisantant que «ce bâtiment est tellement beau qu'ils hésiteraient presque à y mettre des vaches!». Nicolas Lebatard en est persuadé: on peut aujourd'hui conjuguer esthétique, confort de travail, bien-être animal et efficacité énergétique dans un cadre économique maîtrisé. Le tout en donnant l'image d'un métier de haute technologie.
Cette vision, il l'a cultivée sur la ferme parentale et dans les exploitations qu'il a fréquentées.
«De 16 à 21 ans, j'ai beaucoup travaillé pendant les week-ends ou les vacances comme vacher et porcher de remplacement, raconte Nicolas. Ces emplois temporaires dans une cinquantaine d'exploitations différentes ont nourri ma réflexion sur la manière d'imaginer le bâtiment, les conditions de travail et le confort intérieur.» Le résultat couché sur le papier et concrétisé par des maquettes est à la hauteur des quelque 1.450 heures de travail.
En guise de fondation à son projet, le jeune architecte a parié sur la fin des quotas et sur le nécessaire regroupement des ateliers laitiers pour mieux résoudre les problèmes d'astreinte. Il est donc parti d'une hypothèse réelle, prise dans sa région d'origine, à travers laquelle quatre exploitations formeront bientôt une société laitière composée de cinq personnes mais qui pourrait perdurer au départ d'un, voire de deux associés. Il a aussi beaucoup misé sur l'autonomie énergétique, la facilité de circulation, tout en tenant compte d'inévitables contraintes zootechniques sanitaires et environnementales.
Autonomie énergétique et automates
Le fruit de cette réflexion est un ensemble de 300 m de longueur sur 41 m de largeur, planté au milieu de 500 ha, pouvant abriter 400 animaux et divisé en quatre parties dont un «coeur de ferme» réuni sur 100 mètres; un sous-ensemble de 210 m sur 41 m est prévu pour le stockage. Nicolas Lebatard ajoute: «L'implantation centrale dans un parcellaire de grande taille, mais qui conserve les haies, facilite les accès et réduit les déplacements des hommes ou des animaux, donc économise de l'énergie. Quant à la surface fourragère prévue, elle répond au souci d'autonomie alimentaire du troupeau.»
L'architecte réfute le terme de «cathédrale», souvent employé pour qualifier certains édifices massifs construits dans le passé. «Malgré sa taille, le bâtiment reste de hauteur modeste (8 m) et il est conçu pour se marier avec le paysage.» Le choix des matériaux y contribue pour une large part. «J'ai préféré le bois, plus beau, moins résonnant et plus résistant au feu que l'acier. Par ailleurs, en termes d'ambiance, le bois absorbe mieux l'humidité, détaille-t-il, persuadé qu'il y a aujourd'hui des règles de construction sur lesquelles on ne fera pas marche arrière.»
Le toit à lui seul illustre la vision de Nicolas Lebatard pour les bâtiments agricoles du futur. D'après lui, il faut remédier aux inconvénients des toitures en tôle ou Fibrociment, qui sont l'apanage de nombreuses constructions existantes. D'où son idée de créer un jeu de toitures dissymétriques favorables à l'aération, en panneaux de bois compressé recouverts de terre végétale. «La toiture végétalisée est une solution d'avenir dans la mesure où elle donne de l'inertie thermique été comme hiver et absorbe mieux les bruits», affirme-t-il.
Nicolas n'est pas particulièrement convaincus par les panneaux solaires, dont la récupération en fin de vie le préoccupe. C'est pourquoi il a opté pour un système de production de biogaz qui assurerait la fourniture d'électricité et permettrait de chauffer le bâtiment et l'eau. Autre option technique choisie, celle du dispositif de traite. Fort de son expérience d'éleveur, Nicolas Lebatard marque une préférence pour le manège qui reste «simple et efficace» par rapport au robot, qui nécessite d'après lui «beaucoup de maintenance et qui s'avère moins adapté aux exploitations disposant de grandes surfaces herbagères». Un robot serait, en revanche, installé pour effectuer le paillage automatique des logettes.
A ce stade, le projet de Nicolas Lebatard ne demande qu'à vivre, quitte à être amendé ou simplifié le cas échéant. «Le prix du mètre carré, évalué entre 750 et 850 €/m2, contre 600 euros pour un bâtiment classique, devrait être assez vite compensé par les gains induits en matière d'énergie et de productivité», estime l'architecte. Dans le secteur de l'élevage laitier, son projet a su éveiller la curiosité. Il est maintenant contacté pour apporter son regard, ses idées et son expertise, car la modernisation du parc de bâtiments est un gage du renouvellement des générations.
Le plein de lumière et d'espace
1. Ses expériences en élevage ont beaucoup servi à Nicolas Lebatard pour étudier les conditions d'ambiance de ce bâtiment futuriste. Un jeu de toitures asymétriques épousant les poutres maîtresses a été créé pour faciliter la ventilation naturelle de l'ensemble. Des matériaux innovants sont utilisés en façade, comme un polycarbonate perforé spécial favorisant la luminosité tout en jouant le rôle d'un filet brise-vent.
2. Une grande halle. Vue de la façade du coeur de ferme. Les accès et les zones de travail sont conçus de manière à réduire les déplacements.
Feu de tout bois. Mis à part les barrières, cornadis et logettes, le bois, en version lamellé-collé, est omniprésent; un matériau d'avenir d'après Nicolas Lebatard.
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